NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. GÉNÉRALE

CAT/C/AUS/CO/3 22 mai 2008

FRANÇAIS Original: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE Quarantième session 28 avril‑16 mai 2008

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité contre la torture

AUSTRALIE

1.       Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de l’Australie (CAT/C/67/Add.7) à ses 812e et 815e séances (CAT/C/SR.812 et 815), tenues les 29 et 30 avril, et a adopté, à sa 828e séance (CAT/C/SR.828), les observations finales ci‑après.

A.  Introduction

2.       Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique de l’Australie, ainsi que les réponses détaillées et complètes à la liste des points à traiter et l’additif, qui ont fourni un complément d’information sur les mesures législatives, administratives, judiciaires et autres mesures prises par l’État partie aux fins de l’application de la Convention. Le Comité se félicite également du dialogue constructif engagé avec une délégation compétente et multisectorielle.

3.       Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a soumis un document de base conforme aux critères d’établissement des documents de base communs énoncés dans les directives harmonisées relatives aux rapports soumis au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

B.  Aspects positifs

4.       Le Comité prend note avec satisfaction des modifications législatives adoptées en 2005 en ce qui concerne la détention d’immigrants. Le Comité relève en particulier avec satisfaction:

a)       Les changements apportés à la loi et à la pratique concernant la détention d’enfants immigrants;

b)      La fermeture des centres de transit extraterritoriaux de Nauru et de Papouasie‑Nouvelle‑Guinée et la décision de mettre un terme à la politique dite «Stratégie du Pacifique».

5.       Le Comité se félicite de ce que le Gouvernement a présenté des excuses aux Aborigènes et aux insulaires du détroit de Torres pour les politiques et lois antérieures en application desquelles des enfants ont été enlevés à leur famille et à leur communauté.

6.       Le Comité se félicite de l’engagement pris par l’État partie d’adhérer au Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

7.       Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a ratifié le 1er juillet 2002 le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

C.  Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Article premier

8.       Le Comité note que le Gouvernement australien envisage d’inscrire dans le droit du Commonwealth une infraction qui couvrirait spécifiquement la torture et serait d’application extraterritoriale, mais il s’inquiète du fait qu’il n’y ait pas une infraction correspondant à la torture à l’échelon fédéral, ainsi que des lacunes constatées dans l’incrimination de la torture au niveau de certains États et territoires (art. 1er et 4).

L’État partie devrait veiller à ce que la torture soit correctement définie et expressément érigée en infraction pénale au niveau fédéral comme au niveau des États et territoires, conformément à l’article premier de la Convention.

Article 2

9.       Le Comité est préoccupé par le fait que la Convention n’a été que partiellement incorporée dans le droit fédéral et note qu’il n’y a pas dans l’État partie une protection constitutionnelle ou législative des droits de l’homme au niveau fédéral, c’est‑à‑dire une déclaration ou une charte fédérale des droits qui protégerait, entre autres, les droits figurant dans la Convention.

L’État partie devrait incorporer intégralement la Convention dans son droit interne, notamment en accélérant le processus de promulgation d’une disposition prévoyant expressément l’incrimination de la torture au niveau fédéral. L’État partie devrait poursuivre les consultations concernant l’adoption d’une déclaration des droits de manière à assurer une protection constitutionnelle complète des droits fondamentaux de l’être humain à l’échelon fédéral.

10.     Le Comité note l’existence des sauvegardes législatives et procédurales nécessaires pour que les individus soient traités dans le respect de leurs droits, mais est néanmoins préoccupé par les questions suivantes relatives aux lois et à la pratique antiterroristes de l’État partie:

a)       Les pouvoirs accrus conférés à l’Agence australienne de renseignement relatif à la sécurité (ASIO), notamment la possibilité de détenir des personnes pour des périodes renouvelables de sept jours à des fins d’interrogatoire, ce qui pose quelques problèmes, d’autant que l’intéressé n’a pas droit à la présence d’un avocat de son choix à l’interrogatoire ni à l’examen de la validité de la détention par un organe judiciaire;

b)      L’absence d’examen judiciaire et le secret qui entoure l’exécution des ordonnances de détention et de contrôle introduits par la loi antiterroriste (no 2) de 2005;

c)       Les informations faisant état des conditions carcérales rigoureuses imposées aux détenus non condamnés accusés d’infractions liées au terrorisme, compte tenu également de leur statut de personne accusée (et non condamnée).

L’État partie devrait:

a)      Veiller à ce que les pouvoirs de détention accrus conférés à l’ASIO soient en conformité avec le droit à un procès équitable et le droit de demander à un tribunal de statuer sur la licéité de la détention;

b)      Garantir que l’exécution des ordonnances tant de détention provisoire que de contrôle est conforme aux obligations de l’État partie en matière de droits de l’homme, notamment au droit à un procès équitable, y compris à des garanties procédurales;

c)       Veiller à ce que les personnes en détention provisoire soient séparées des personnes condamnées et fassent l’objet d’un traitement distinct conforme à leur statut de personne non condamnée.

11.     Le Comité est préoccupé par la politique de détention obligatoire des personnes qui sont entrées clandestinement sur le territoire de l’État partie. Il est plus particulièrement préoccupé à cet égard par la situation des immigrés apatrides en détention qui ne peuvent être renvoyés dans aucun autre pays et courent le risque d’être détenus ad infinitum.

L’État partie devrait:

a)      Envisager d’abolir la politique de détention obligatoire des immigrants entrés irrégulièrement sur son territoire. La détention devrait être une mesure à n’utiliser qu’en dernier recours et pour une durée maximale raisonnable; en outre des mesures non privatives de liberté et des solutions autres que la détention devraient être mises en place pour les immigrants;

b)      Prendre d’urgence des mesures en vue d’éviter que la détention des apatrides ne prenne un caractère indéfini.

12.     Le Comité accueille avec satisfaction les informations fournies par l’État partie selon lesquelles il a été mis fin récemment à la politique consistant à transférer les demandeurs d’asile dans des centres de transit à l’étranger. Il note cependant que des lieux «exclus», notamment l’Île Christmas, sont encore utilisés pour la détention de demandeurs d’asile auxquels est ensuite refusée la possibilité de demander un visa, sauf si le Ministre use de son pouvoir discrétionnaire.

L’État partie devrait cesser d’utiliser des lieux «exclus» pour le traitement des demandes de visa afin de donner à tous les demandeurs d’asile les mêmes possibilités en la matière.

13.     Le Comité note que la désignation d’un médecin choisi par la personne arrêtée n’est pas un droit inscrit dans la loi mais résulte du devoir de protection qui incombe aux agents de la Police fédérale australienne exerçant des fonctions de garde.

L’État partie devrait garantir le droit de désigner un médecin totalement indépendant qui soit de préférence choisi par la personne arrêtée.

14.     Le Comité prend note avec satisfaction de l’action menée par la Commission des droits de l’homme et de l’égalité des chances (HREOC) pour protéger et promouvoir les droits de l’homme dans l’État partie mais regrette que:

a)       La Commission soit certes habilitée à enquêter sur les plaintes faisant état de torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention relative aux droits de l’enfant mais que la Convention contre la torture ne soit pas inscrite dans les compétences de la Commission en matière de traitement des plaintes;

b)      La Commission ne puisse faire que des recommandations à caractère consultatif;

c)       Les pouvoirs de la Commission en matière de traitement des plaintes ne s’étendent pas aux enquêtes sur les actes et pratiques des organismes de renseignements.

L’État partie devrait envisager de renforcer et d’étendre le mandat de la Commission des droits de l’homme et de l’égalité des chances, notamment en y incluant le traitement des plaintes pour violation de la Convention contre la torture, y compris les actes commis par des agents des organismes de renseignements. En outre, le Comité demande instamment à l’État partie de donner dûment suite aux recommandations de la Commission.

Article 3

15.     Le Comité est préoccupé par le fait que l’interdiction du non‑refoulement n’est pas inscrite dans la législation de l’État partie sous la forme d’une disposition expresse non susceptible de dérogation, ce qui peut aussi conduire à des pratiques contraires à la Convention. Le Comité note également avec préoccupation que certaines carences touchant aux obligations de non‑refoulement à assumer en vertu de la Convention tiennent peut‑être au recours exclusif aux pouvoirs discrétionnaires du Ministre. Le Comité se félicite à ce propos de l’information selon laquelle le Ministre de l’immigration et de la citoyenneté aurait lui‑même suggéré que les vastes pouvoirs discrétionnaires qui lui sont conférés par la législation existante soient réexaminés.

L’État partie devrait expressément incorporer dans sa législation interne, tant à l’échelon fédéral que des États/territoires, la disposition interdisant à un État partie d’expulser, de refouler et d’extrader une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture (non‑refoulement), et la mettre en œuvre dans la pratique. L’État partie devrait également appliquer les recommandations antérieures formulées par le Comité lors de l’examen de son deuxième rapport périodique, visant à adopter un système de protection complémentaire pour que les obligations de non‑refoulement découlant de la Convention ne soient pas uniquement fonction des pouvoirs discrétionnaires laissés au Ministre.

16.     Le Comité rappelle aux États parties qu’ils ne peuvent en aucun cas recourir aux assurances diplomatiques comme garanties contre la torture ou les mauvais traitements lorsqu’il y a des motifs sérieux de croire qu’une personne risque d’être soumise à la torture ou à des mauvais traitements si elle retourne dans son pays.

S’il recourt aux assurances diplomatiques dans toute autre situation que celles qui doivent être exclues en vertu de l’article 3 de la Convention, l’État partie devrait, dans son prochain rapport, fournir au Comité des informations sur le nombre de cas d’extradition ou de renvoi subordonnés à l’obtention d’assurances ou de garanties diplomatiques qui ont été recensés depuis le 11 septembre 2001, sur les conditions minimales exigées par l’État partie au titre de ces assurances ou garanties, sur les mesures de suivi qu’il a prises en pareil cas et sur la valeur juridiquement contraignante des assurances ou garanties données.

17.     Le Comité relève que le paragraphe 6 de l’article 198 de la loi sur les migrations dispose qu’un immigrant en d