Nations Unies

CRC/C/KHM/CO/4-6

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

27 juin 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport du Cambodge valant quatrième à sixième rapports périodiques *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport du Cambodge valant quatrième à sixième rapports périodiques à ses 2588e et 2589e séances, les 5 et 6 mai 2022, et a adopté les présentes observations finales à sa 2630e séance, le 3 juin 2022.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport du Cambodge valant quatrième à sixième rapports périodiques, ainsi que les réponses écrites à la liste de points, qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité salue les diverses mesures législatives, institutionnelles et stratégiques prises pour mettre en œuvre la Convention, notamment l’adoption de la loi sur la justice pour mineurs, du plan d’action visant à prévenir et combattre la violence à l’égard des enfants, du plan d’action destiné à améliorer la prise en charge des enfants et des politiques relatives à la protection de l’enfance en milieu scolaire et à l’éducation inclusive. Il note avec satisfaction que le Cambodge a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées en 2012 et adhéré à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées en 2013.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

4.Le Comité rappelle à l’État partie le caractère indivisible et interdépendant de tous les droits consacrés par la Convention et souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il appelle son attention sur les recommandations concernant les domaines ci-après, dans lesquels il est urgent de prendre des mesures : les châtiments corporels (par. 26), l’exploitation sexuelle et les abus sexuels (par. 28), les enfants privés de milieu familial (par. 32), l’éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles (par. 42), l’exploitation économique, y compris le travail des enfants (par. 46) et l’administration de la justice pour enfants (par. 50).

5.Le Comité recommande à l’État partie de garantir la réalisation des droits de l’enfant conformément à la Convention, au Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, et au Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il le prie instamment d’intégrer toutes les cibles des objectifs de développement durable dans son cadre national et de faire en sorte que les enfants participent véritablement à la conception et à l’application des politiques et des programmes visant à atteindre les 17 objectifs de développement durable dans la mesure où ils concernent les enfants .

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Législation

6.Rappelant ses précédentes recommandations , le Comité recommande à l’État partie :

a)D’accélérer l’adoption d’une loi complète sur la protection de l’enfance qui couvre tous les principes et les dispositions de la Convention ; d’établir un cadre juridique complet régissant l’orientation vers les services de protection de l’enfance et la prestation de ces services, les rôles et responsabilités de chaque entité publique et le rôle des travailleurs sociaux ; d’allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à l’application de la Convention  ;

b)D’assurer l’application effective de la législation existante, conformément à la Convention ;

c)De renforcer les connaissances des juges, des procureurs et des avocats sur la place de la Convention dans le droit interne et son applicabilité dans les procédures judiciaires.

Politique et stratégie globales

7. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et d’adopter, avec la pleine participation des enfants et de la société civile, une politique globale relative aux enfants qui s’inscrive dans la continuité du plan d’action national sur le développement de l’enfance (2016-2018), soit assortie d’une stratégie globale de mise en œuvre et d’un mécanisme de contrôle et d’évaluation, et soit dotée de ressources humaines, techniques et financières suffisantes.

Coordination

8.Le Comité recommande à l’État partie :

a)De renforcer les pouvoirs du Conseil national cambodgien pour les enfants et de faire en sorte qu’il dispose de ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour surveiller et coordonner efficacement toutes les activités liées à l’application de la Convention dans tous les secteurs, aux niveaux national et local et au niveau des districts, y compris la mise en œuvre des différents plans d’action relatifs aux droits de l’enfant ;

b)De renforcer les capacités des comités consultatifs pour les femmes et les enfants, y compris celles des comités municipaux, notamment par l’allocation de ressources financières suffisantes, en vue d’intégrer les droits de l’enfant dans les plans de développement infranationaux.

Allocation de ressources

9.Rappelant son observation générale n o  19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant, le Comité renouvelle ses recommandations précédentes et prie instamment l’État partie :

a)D’augmenter les ressources financières, humaines et techniques allouées à la mise en œuvre de toutes les mesures législatives et de tous les plans, programmes et politiques relatifs à l’enfance, y compris le Plan national de développement stratégique (2019-2023), et aux travailleurs sociaux spécialisés et autres professionnels de la protection de l’enfance ;

b)De tirer profit de la réforme actuelle de la gestion des finances publiques pour adopter un système de suivi de l’utilisation des allocations budgétaires consacrées à la réalisation des droits de l’enfant et ainsi garantir leur efficacité ;

c)D’évaluer régulièrement les effets distributifs des investissements publics dans les secteurs qui soutiennent la réalisation des droits de l’enfant et de définir des mesures propres à remédier à toutes disparités entre les filles et les garçons, en accordant une attention particulière aux enfants handicapés, aux enfants appartenant à un groupe minoritaire et aux enfants vivant dans la pauvreté ;

d)De renforcer les mécanismes visant à ce que les budgets soient établis de manière transparente et inclusive, en permettant aux enfants, à la société civile et au public de participer à toutes les étapes du processus budgétaire, à savoir l’élaboration, l’exécution, le suivi et l’évaluation, et en organisant dans tous les districts des consultations avec les enfants sur la planification budgétaire et l’établissement des budgets ;

e)De lutter contre la corruption et de renforcer les moyens institutionnels permettant de détecter les actes de corruption, d’enquêter sur ces actes et d’en poursuivre les auteurs.

Collecte de données

10.Le Comité se félicite de la création du système de gestion des informations sur la protection de l’enfance en 2019 et recommande à l’État partie :

a)D’élaborer une stratégie à long terme pour assurer le fonctionnement effectif du système de gestion des informations sur la protection de l’enfance, notamment de lui allouer des ressources suffisantes ; d’établir un cadre pour la soumission régulière de rapports et le suivi ; d’intégrer des indicateurs relatifs aux droits de l’enfant dans le Système national d’information administré par l’Institut national de statistique  ;

b)De veiller à ce que les données collectées sur les droits de l’enfant couvrent tous les domaines visés par la Convention et les protocoles facultatifs s’y rapportant et à ce qu’elles soient ventilées par âge, sexe, handicap, nationalité, zone géographique, origine ethnique et situation socioéconomique, de manière à faciliter l’analyse de la situation de tous les enfants, particulièrement en ce qui concerne la violence, les enfants handicapés, la santé, les enfants en situation de rue, le travail des enfants et la justice pour enfants ;

c)De veiller à ce que les données et les indicateurs relatifs aux droits de l’enfant soient communiqués aux ministères compétents et utilisés pour élaborer, suivre et évaluer les politiques, programmes et projets visant à assurer la mise en œuvre effective de la Convention ;

d)De renforcer les capacités de l’Institut national de statistique et des professionnels concernés s’agissant de la collecte de données sur les droits de l’enfant.

Mécanisme de suivi indépendant

11. Rappelant ses précédentes recommandations , le Comité recommande à l’État partie de mettre en place rapidement un mécanisme indépendant de suivi des droits de l’enfant dont le mandat soit pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et qui soit en mesure de recevoir, d’instruire et de traiter les plaintes des enfants d’une manière adaptée aux besoins des enfants .

Diffusion, sensibilisation et formation

12.Le Comité se félicite de l’intégration des droits de l’enfant dans les programmes scolaires et recommande à l’État partie :

a)De renforcer ses programmes de sensibilisation, en coopération avec les organisations de la société civile et au moyen d’une participation accrue des médias et des médias sociaux, afin que la Convention soit largement connue des enfants, des parents et du grand public ;

b)D’inciter les médias à promouvoir les droits de l’enfant, et de mener toutes les activités de mobilisation de l’opinion d’une manière qui soit adaptée aux enfants et avec la participation active de ceux-ci ;

c)De prévoir des modules obligatoires consacrés à la Convention dans les programmes de formation destinés aux fonctionnaires, aux membres des forces de l’ordre, aux juges, aux procureurs, aux avocats, aux enseignants, aux travailleurs sociaux, aux professionnels de la santé et aux autres professionnels qui travaillent au service ou au contact d’enfants, aux niveaux national et local.

Coopération avec la société civile

13.Prenant note avec une vive préoccupation de la loi sur les associations et les organisations non gouvernementales (ONG) , le Comité rappelle à l ’ État partie que les organisations de la société civile indépendantes et les défenseurs des droits de l ’ homme , y compris les enfants défenseurs des droits de l’homme, jouent un rôle important dans la promotion des droits humains des enfants, et le prie instamment :

a)De faire en sorte que les organisations de la société civile et les défenseurs des droits de l’homme, y compris les enfants défenseurs des droits de l ’ homme , puissent promouvoir les droits de l’enfant et exercer leur droit à la liberté d’expression et d’opinion sans faire l’objet ni de harcèlement ni de restrictions disproportionnées en lien avec la pandémie, notamment en modifiant la loi sur les associations et les ONG  ;

b)De mener sans délai des enquêtes approfondies sur toutes les allégations d’intimidation de défenseurs des droits de l’homme, y compris d’enfants défenseurs des droits de l ’ homme , et de leurs familles, et de veiller à ce qu’ils bénéficient d’un accès suffisant à la justice et soient protégés contre le harcèlement, les actes d’intimidation, les représailles et la violence .

Droits de l’enfant et entreprises

14.Rappelant son observation générale n o  16 (2013) sur les obligations des États concernant les incidences du secteur des entreprises sur les droits de l’enfant et ses précédentes recommandations , le Comité recommande à l’État partie :

a)D’élaborer et d’appliquer une réglementation visant à garantir que les entreprises, notamment dans les secteurs de l’industrie manufacturière et du tourisme, respectent les normes internationales et nationales relatives aux droits de l’homme, au travail, à l’environnement et à d’autres domaines, tout particulièrement en ce qui concerne les droits de l’enfant ;

b)D’établir un cadre de protection de l’enfance applicable aux entreprises qui opèrent dans l’État partie, comprenant des mécanismes qui permettent d’évaluer les effets de leurs activités sur les droits de l’enfant, ainsi que de signaler les violations des droits de l’enfant, d’enquêter à leur sujet et de leur donner suite.

B.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

15.Le Comité reste profondément préoccupé par la persistance des disparités relatives aux droits des enfants en situation de vulnérabilité et des stéréotypes de genre discriminatoires, comme en atteste le code de conduite des femmes (Chbap Srey). Compte tenu de la cible 10.3 des objectifs de développement durable, il rappelle ses précédentes recommandations et prie instamment l’État partie  :

a)De réduire les disparités d’accès à tous les services publics pour les filles, les enfants vivant en milieu rural, les enfants handicapés, les enfants homosexuels, bisexuels, transgenres et intersexes, les enfants sans parents, les enfants vivant dans la pauvreté, les enfants en situation de rue, les enfants appartenant à un groupe minoritaire ou à un groupe autochtone, les enfants d’origine vietnamienne, les enfants khmers-krom et les enfants vivant avec le VIH/sida, et d’évaluer régulièrement la jouissance par ces enfants de leurs droits ;

b)De