Nations Unies

E/C.12/GBR/CO/6

Conseil économique et social

Distr. générale

14 juillet 2016

Français

Original : anglais

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le sixième rapport périodique du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord *

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le sixième rapport périodique du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/GBR/6) à ses 36e et 37e séances (E/C.12/2016/SR.36 et 37), tenues les 15 et 16 juin 2016, et a adopté, à sa 49e séance, tenue le 24 juin 2016, les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique soumis par l’État partie ainsi que les informations complémentaires fournies dans ses réponses à la liste de points (E/C.12/GBR/Q/6/Add.1). Il se félicite en outre du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation interministérielle de l’État partie, qui comptait des représentants des gouvernements écossais et gallois. Le Comité regrette qu’en raison de l’absence de représentants du Gouvernement nord-irlandais, il n’a pas été en mesure de se faire une idée complète de la façon dont les droits consacrés par le Pacte étaient exercés en Irlande du Nord.

B.Aspects positifs

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié, le 8 juin 2009, la Convention relative aux droits des personnes handicapées et, le 7 août 2009, le Protocole facultatif s’y rapportant.

Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption des textes ci-après :

a)La loi intitulée Modern Slavery Act 2015 (loi de 2015 relative aux formes contemporaines d’esclavage) ;

b)La loi intitulée Care Act 2014 (loi de 2014 relative à la protection sociale) ;

c)La stratégie d’intégration des réfugiés dans les collectivités écossaises pour la période 2014-2017, intitulée « The New Scots: Integrating Refugees in Scotland’s Communities (2014­2017) » ;

d)Le plan d’action national en faveur des droits de l’homme 2013-2017 de l’Écosse.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels

Le Comité prend acte de la position de l’État partie concernant l’incorporation dans le droit interne des dispositions du Pacte, mais regrette que celles-ci ne puissent pas être directement appliquées par les tribunaux nationaux, ce qui est susceptible de limiter l’accès des personnes à un recours utile en cas de violation du Pacte.

Le Comité rappelle sa précédente recommandation (voir E/C.12/GBR/CO/5, par. 13) et engage l’État partie à incorporer pleinement les droits consacrés par le Pacte dans son ordre juridique interne et à faire en sorte que les victimes de violations des droits économiques, sociaux et culturels aient pleinement accès à un recours utile. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale no 9 (1998) concernant l’application du Pacte au niveau national.

Administrations décentralisées

Le Comité est conscient que l’État partie a une structure complexe du fait de la mise en place de gouvernements décentralisés au Pays de Galles, en Écosse et en Irlande du Nord, et qu’il a responsabilités à l’égard des territoires britanniques d’outre-mer et des dépendances de la Couronne, mais regrette que l’Irlande du Nord n’ait pas participé à l’examen du rapport et que peu d’informations lui aient été fournies sur l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels dans les territoires britanniques d’outre-mer et dans les dépendances de la Couronne (art. 2).

  Conformément à sa recommandation précédente (voir E/C.12/GBR/CO/5, par. 12), le Comité rappelle à l’État partie qu’il est responsable en dernier ressort de l’application du Pacte dans toutes les entités relevant de sa juridiction, ycompris dans les territoires britanniques d’outre-mer et les dépendances de la Couronne. Il lui recommande en outre de prendre toutes les mesures voulues pour garantir le plein exercice des droits économiques, sociaux et culturels par toutes les personnes relevant de sa juridiction.

Charte des droits

Le Comité prend note des préoccupations exprimées par des acteurs nationaux au sujet du projet annoncé de remplacement de la loi intitulée Human Rights Act 1998 (loi de 1998 relative aux droits de l’homme) par une nouvelle charte britannique des droits, qui risque selon eux de reléguer au second plan les normes internationales et régionales protégeant les droits de l’homme, dont les droits économiques, sociaux et culturels, dans l’État partie. Le Comité regrette qu’une charte des droits pour l’Irlande du Nord telle que prévue dans l’Accord de Belfast (Accord du Vendredi saint) n’ait pas encore été adoptée.

Le Comité recommande à l’État partie de tenir une large consultation publique sur son projet d’abrogation de la loi intitulée Human Rights Act 1998 ainsi que sur la proposition de nouvelle charte des droits. Il lui recommande également de prendre toutes les mesures voulues pour garantir que toute nouvelle législation dans ce domaine ait pour objectif de renforcer l’importance des droits de l’homme, notamment des droits économiques, sociaux et culturels, dans l’ordre juridique interne et prévoie une protection efficace de ces droits dans toutes les entités relevant de sa juridiction. Le Comité rappelle sa précédente recommandation (voir E/C.12/GBR/CO/5, par. 10) et invite instamment l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer l’adoption d’une charte des droits pour l’Irlande du Nord.

Respect par les entreprises des droits économiques, sociaux et culturels

Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption du plan d’action national relatif aux entreprises et aux droits de l’homme. Il est toutefois préoccupé par l’absence de cadre réglementaire permettant de s’assurer que les entreprises qui mènent des activités dans l’État partie ainsi que celles qui relèvent de sa juridiction et qui ont des activités à l’étranger respectent pleinement les droits économiques, sociaux et culturels (art. 2, par. 1)).

  Le Comité engage l’État partie à:

  a)Établir un cadre réglementaire précis à l’intention des entreprises qui mènent des activités au Royaume-Uni afin de garantir que celles-ci n’entravent pas l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels;

  b)Adopter les mesures législatives et administratives nécessaires pour établir la responsabilité juridique des entreprises domiciliées dans une entité relevant de sa juridiction lorsque des violations des droits économiques, sociaux et culturels sont commises directement par ces entreprises dans le contexte de l’exécution de leurs projets à l’étranger ou par leurs filiales;

c)Procéder à des analyses approfondies des risques avant d’accorder des licences à l’exportation d’armes et refuser d’accorder ou suspendre une licence lorsqu’il existe un risque que des armes soient utilisées pour violer les droits de l’homme, dont les droits économiques, sociaux et culturels.

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa déclaration sur les obligations des États parties concernant le secteur des entreprises et les droits économiques, sociaux et culturels (E/2012/22-E/C.12/2011/3, annexe VI, sect. A).

Coopération internationale pour le développement

Le Comité félicite l’État partie d’avoir atteint l’objectif international consistant à allouer 0,7 % du produit national brut à l’aide publique au développement dans le cadre de la coopération internationale, mais relève avec préoccupation que, dans certains cas, l’aide accordée aurait été utilisée pour financer des activités contraires aux droits économiques, sociaux et culturels dans les pays destinataires. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que l’État partie aurait accordé des aides à des acteurs privés aux fins de la réalisation de projets d’enseignement privé et bon marché dans les pays en développement, ce qui aurait contribué à la détérioration de la qualité de l’enseignement public gratuit et créé une ségrégation et une discrimination entre les élèves et les étudiants (art. 2, 13 et 14).

  Le Comité engage l’État partie à suivre une approche fondée sur les droits de l’homme dans ses politiques de coopération internationale pour le développement:

  a)En procédant à une étude systématique et indépendante de l’incidence sur les droits de l’homme des projets de coopération pour le développement avant de prendre une décision à leur sujet;

  b)En créant un mécanisme de surveillance efficace chargé de déterminer régulièrement l’incidence sur les droits de l’homme des politiques et des projets dans les pays destinataires et de prendre les mesures correctives nécessaires, s’il y a lieu;

c)En veillant à ce qu’un mécanisme accessible de plainte permettant de dénoncer les violations des droits économiques, sociaux et culturels commises dans les pays destinataires fasse partie intégrante du cadre des projets de coopération pour le développement.

Politique fiscale

Le Comité note avec préoccupation que les modifications récemment apportées à la politique fiscale de l’État partie, dont le relèvement du seuil d’abattement applicable aux droits de succession et l’augmentation de la taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que la réduction progressive de l’impôt sur le revenu des sociétés affaiblissent la capacité des pouvoirs publics à faire face aux inégalités sociales persistantes et à collecter des recettes suffisantes pour atteindre l’objectif de la pleine réalisation des droits économiques, sociaux et culturels par les personnes et groupes dé