Nations Unies

CRC/C/BGR/CO/3-5

Convention relativeaux droits de l’enfant

Distr. générale

21 novembre 2016

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport de la Bulgarie valant troisième à cinquième rapports périodiques *

I.Introduction

Le Comité a examiné le rapport de la Bulgarie valant troisième à cinquième rapports périodiques (CRC/C/BGR/3-5) à ses 2123e et 2124e séances (voir CRC/C/SR.2123 et 2124), le 30 mai 2016, et a adopté les observations finales ci-après à sa 2132e séance (voir CRC/C/SR.2132), le 3 juin 2016.

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de la Bulgarie valant troisième à cinquième rapports périodiques ainsi que les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/BGR/Q/3-5), qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

Le Comité salue les progrès réalisés par l’État partie dans divers domaines, notamment la ratification d’instruments internationaux et régionaux, l’adhésion à de tels instruments et l’adoption, depuis l’examen précédent, de plusieurs lois, mesures institutionnelles et politiques relatives aux droits de l’enfants, en particulier la Stratégie nationale pour l’intégration des Roms (2012-2020).

Le Comité prend note avec satisfaction de l’invitation adressée par l’État partie au Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités et de la coopération dont il a fait preuve à l’occasion de la visite que celui-ci a effectuée dans le pays en 2011.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6)de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite aux recommandations formulées dans ses observations finales de 2008 (CRC/C/BGR/CO/2) qui n’ont pas été appliquées ou qui l’ont été de façon insuffisante.

Législation

Le Comité note que l’État partie a progressé dans l’harmonisation de sa législation avec les principes de la Convention en adoptant un nouveau Code de la famille en 2009 et en modifiant la loi sur la protection de l’enfance, la loi sur les allocations familiales et la loi sur l’aide sociale, mais il reste préoccupé par le manque de cohérence de certains textes législatifs majeurs touchant aux droits de l’enfant, en particulier la loi sur les personnes et la famille et la loi sur la protection de l’enfance. Il constate également avec préoccupation qu’il y a des lacunes dans l’application de la législation car les lois sont interprétées de manière vague, parce que le système judiciaire souffre d’un manque de capacités et que les autorités judiciaires n’ont pas une connaissance suffisante des droits de l’enfant.

Le Comité rappelle la recommandation qu’il a formulée dans ses précédentes observations finales (par. 9) et encourage l’État partie à continuer d’harmoniser sa législation avec les principes et les dispositions de la Convention.Il lui recommande en particulier :

a)De prendre des mesures pour que les lois internes relatives aux droits de l’enfant soient harmonisées avec la loi sur la protection de l’enfance ;

b)De mettre en place une procédure permettant d’évaluer les incidences de toutes les nouvelles lois adoptées au niveau national sur les droits de l’enfant ;

c)De s’employer à renforcer continuellement les capacités des juges, des procureurs et des avocats en matière de droit international des droits de l’homme, dans la logique de la recommandation formulée par le Rapporteur spécial sur l’indépendance des juges et des avocats (voir A/HRC/20/19/Add.2, par. 105), en mettant l’accent en particulier sur la Convention.

Politique et stratégie globales

Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption de la Stratégie nationale pour l’enfance (2008-2018) visant à améliorer la coordination et la mise en œuvre de la Convention. Toutefois, il trouve préoccupant que, comme le montre l’évaluation externe de la stratégie réalisée en 2011, des progrès n’aient pas été réalisés dans tous les domaines prévus. Il s’inquiète en particulier du manque de coordination entre les différentes politiques sectorielles et du fait que la stratégie est excessivement axée sur les enfants vulnérables. Il regrette également que le projet de loi sur l’enfance, qui prévoyait la création d’une commission des droits de l’enfant, n’ait pas été adopté en raison du manque de soutien public.

Le Comité recommande à l’État partie :

a)D’examiner les recommandations issues de l’évaluation externe de la stratégie et de modifier la stratégie en conséquence pour qu’elle soit aussi exhaustive que possible, qu’elle couvre tous les domaines visés par la Convention et qu’elle tienne compte de tous les enfants ;

b)De faire en sorte que tous les éléments nécessaires à l’application de la stratégie − notamment des ressources humaines, techniques et financières suffisantes − soient réunis ;

c)De tenir des consultations avec l’ensemble des parties prenantes, notamment les enfants, afin de développer la stratégie, et de continuer à évaluer régulièrement l’efficacité de sa mise en œuvre ;

d)De concevoir une campagne de sensibilisation afin de promouvoir les avantages qui résulteraient de la création d’une commission des droits de l’enfant.

Coordination

Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place un mécanisme institutionnel interministériel doté d’un mandat clair et investi de pouvoirs suffisants qui serait chargé de coordonner l’ensemble des activités liées à la mise en œuvre de la Convention aux niveaux intersectoriel, national, régional et local.L’État partie devrait veiller à ce que ce que les ressources humaines, techniques et financières nécessaires au bon fonctionnement de ce mécanisme soient mises à disposition.

Allocation de ressources

Le Comité constate avec préoccupation que les budgets des secteurs et organismes pertinents ne précisent pas quels crédits sont alloués en faveur des enfants, qu’il n’y a pas d’indicateurs et de systèmes de suivi à chaque niveau, et que le budget ne fait pas apparaître de crédits destinés spécialement aux enfants marginalisés et vulnérables, comme les enfants roms, les enfants handicapés, les enfants migrants et les enfants de réfugiés et de demandeurs d’asile. Le Comité relève également avec préoccupation que les ressources consacrées à l’enseignement public dans l’État partie sont plus faibles que dans tous les autres pays de l’Union européenne en termes de pourcentage du produit intérieur brut.

À la lumière de la journée de débat général qu’il a organisée en 2007 sur le thème « Ressources pour les droits de l’enfant : responsabilité des États », le Comité recommande à l’État partie :

a)D’adopter une approche axée sur les droits de l’enfant dans le cadre de l’élaboration de son budget et de préciser les crédits alloués en faveur des enfants dans les budgets des secteurs et organismes pertinents, y compris les indicateurs et le système de suivi utilisés ;

b)De mettre en place des mécanismes de suivi et d’évaluation permettant de déterminer si les ressources allouées à la mise en œuvre de la Convention sont suffisantes et si elles sont efficacement et équitablement réparties ;

c)De veiller à ce que son budget soit élaboré de manière transparente et participative en entretenant un dialogue avec la population, en particulier avec les enfants, et de faire en sorte que les autorités rendent dûment compte de leurs actions, y compris au niveau local ;

d)De procéder à une évaluation complète des besoins budgétaires dans le domaine de l’enfance et d’allouer des crédits suffisants à la mise en œuvre des droits de l’enfant, conformément à l’article 4 de la Convention,d’accroître les crédits alloués aux secteurs sociaux,de réduire les disparités en se fondant sur les indicateurs relatifs aux droits de l’enfantet, en particulier, d’augmenter sensiblement les crédits consacrés à l’éducation et à l’aide sociale de sorte qu’ils atteignent un niveau adéquat.

Collecte de données

Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour mettre au point un système de collecte de données sous les auspices de l’Agence nationale pour la protection de l’enfance et de l’Institut national de statistiques, mais reste préoccupé par le fait que, comme il n’existe pas de base de données unique centralisée, très peu de données ventilées sont disponibles concernant les enfants, en particulier les enfants handicapés, les enfants marginalisés et les enfants roms.

À la lumière de son observation générale no 5 (2003) sur les mesures d’application générales de la Convention relative aux droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie :

a)D’améliorer rapidement son système de collecte de données afin qu’il couvre tous les domaines de la Convention et de faire en sorte que les données soient ventilées, entre autres, par âge, sexe, handicap, zone géographique, origine ethnique et nationale et milieu socioéconomique, afin de faciliter l’analyse de la situation de tous les enfants, en particulier les enfants vulnérables;

b)De faire en sorte que les données et les indicateurs soient mis en commun par les ministères concernés et utilisés pour élaborer, suivre et évaluer les politiques, programmes et projets destinés à assurer la mise en œuvre effective de la Convention;

c)De tenir compte du cadre conceptuel et méthodologique décrit dans la publication du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme intitulée « Indicateurs des droits de l’homme : Guide pour mesurer et mettre en œuvre » pour définir, collecter et diffuser des données statistiques.

Mécanisme de suivi indépendant

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a intégré les droits de l’enfant dans le mandat de l’Ombudsman en modifiant la loi sur l’Ombudsman en 2012 (art. 19.1.19), et salue la nomination d’un Ombudsman adjoint chargé des droits de l’enfant ainsi que le rôle de l’Ombudsman en tant que mécanisme national de prévention. Néanmoins, il reste préoccupé par le fait que, en raison du manque de ressources du Bureau de l’Ombudsman, les questions relatives aux droits de l’enfant ne sont pas suffisamment traitées.

À la lumière de son observation générale no 2 (2002) sur le rôle des institutions indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie :

a)De renforcer le mandat de l’Ombudsman adjoint de sorte qu’il lui incombe de recevoir, d’examiner et de traiter les plaintes déposées par des enfants d’une manière adaptée à leurs besoins, et de dégager des ressources techniques, humaines et financières suffisantes pour appuyer les travaux du Bureau de l’Ombudsman ;

b)De garantir le respect de la vie privée et la protection des enfants victimes, en particulier dans le cadre des visites de contrôle et de suivi effectuées dans les institutions conformément au rôle de mécanisme national de prévention de l’Ombudsman ;

c)D’assurer en permanence le renforcement des capacités et la formation du personnel du Bureau de l’Ombudsman en ce qui concerne les questions liées aux droits de l’enfant.

Diffusion, sensibilisation et formation

Le Comité réitère la recommandation qu’il a adressée à l’État partie dans ses précédentes observations finales (par. 21) et l’encourage :

a)À redoubler d’efforts pour que les professionnels qui travaillent avec et pour les enfants, comme les responsables de l’application des lois, les parlementaires, les juges, les avocats, les agents sanitaires, les enseignants, les administrateurs des établissements scolaires, les travailleurs sociaux et les professionnels des médias, soient formés et sensibilisés aux droits de l’enfant de manière adaptée et systématique, de même que les professionnels d’autres catégories, selon qu’il convient ;

b)À veiller à ce que les principes et les dispositions de la Convention soient enseignés de manière systématique à tous les niveaux de l’enseignement ;

c)À s’employer avec une attention particulière à promouvoir la participation des enfants à la diffusion d’informations sur leurs droits ;

d)À encourager les médias à prendre les droits de l’enfant en considération et à veiller à ce que les enfants contribuent à l’élaboration des programmes ;

e)À continuer de redoubler d’efforts pour faire mieux connaître la Convention, ses principes et ses dispositions, et à diffuser des informations sur la Convention dans l’ensemble du pays, en étroite coopération avec les organisations non gouvernementales et les autres parties prenantes et en accordant une attention toute particulière aux régions rurales et reculées et aux enfants appartenant à des minorités.

B.Définition de l’enfant (art. 1er)

Le Comité recommande à l’État partie de modifier le Code de la famille afin de supprimer toutes les exceptions autorisant le mariage de personnes de moins de 18 ans.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption de la Stratégie nationale pour l’intégration des Roms (2012-2020), mais reste vivement préoccupé par la discrimination que continuent de subir les enfants roms. Il s’inquiète en particulier des informations selon lesquelles la discrimination dont sont victimes les Roms dans tous les domaines de la vie est une des principales raisons du placement d’enfants roms en institution. Il constate également avec préoccupation que les enfants roms, de même que les enfants handicapés, les enfants demandeurs d’asile ou réfugiés, les enfants appartenant à des minorités et les enfants vivant dans des régions reculées, continuent d’être victimes de discrimination dans l’accès à l’éducation, aux soins de santé et à un logement suffisant. Le Comité note aussi avec préoccupation que la Commission pour la protection contre la discrimination n’a pas d’unité spéciale chargée de traiter les cas de discrimination à l’égard d’enfants.

Le Comité prie instamment l’État partie :

a)De veiller à ce que les lois en vigueur interdisant la discrimination soient appliquées intégralement, notamment en intensifiant les campagnes de sensibilisation qui visent à combattre les attitudes sociales négatives envers les enfants roms, les enfants handicapés, les enfants appartenant à des minorités et aux enfants réfugiés ou demandeurs d’asile ;

b)De faire en sorte que les enfants qui vivent dans des régions rurales aient accès à un enseignement de qualité, à des soins de santé adéquats et à un logement ;

c)D’appliquer la Stratégie nationale pour l’intégration des Roms (2012‑2020) et de veiller à ce que les ressources humaines, techniques et financières nécessaires soient disponibles ;

d)De créer à la Commission pour la protection contre la discrimination un mécanisme spécial chargé de traiter les cas de discrimination à l’égard d’enfants.

Intérêt supérieur de l’enfant

Le Comité note avec satisfaction que la loi sur la protection de l’enfance a été modifiée en 2009 pour garantir le respect du droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale et prend note du cadre général que l’État partie a mis en place pour veiller à ce que la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant soit considérée comme un principe fondamental de la protection de l’enfance. Toutefois, il constate avec préoccupation que ce droit et les responsabilités qu’il entraîne restent mal compris, en particulier par les autorités judiciaires, les professionnels de la protection de l’enfance et les travailleurs sociaux.

À la lumière de son observation générale no 14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour veiller à ce que ce droit soit dûment pris en considération et interprété et respecté de manière uniforme dans toutes les procédures et décisions législatives, administratives et judiciaires et dans toutes les politiques et tous les programmes et projets qui concernent les enfants ou ont une incidence sur eux.À cet égard, le Comité encourage l’État partie à définir des procédures et des critères propres à aider toutes les personnes en position d’autorité à déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant dans tous les domaines et à en faire une considération primordiale.

Droit à la vie, à la survie et au développement

Le Comité note avec satisfaction que, de manière générale, le taux de mortalité postinfantile diminue depuis 2008, relève avec préoccupation que le taux de mortalité infantile est élevé dans certaines régions du pays en raison du manque de soins de santé adéquats, de la pauvreté, de la mauvaise nutrition et de l’existence de pratiques traditionnelles préjudiciables. Il est aussi vivement préoccupé par les allégations persistantes selon lesquelles un grand nombre d’enfants de moins de 3 ans privés de protection parentale et d’enfants présentant un handicap intellectuel ou psychosocial seraient morts des suites de graves maltraitances subies dans des établissements médico‑sociaux. Il note également avec préoccupation que, en raison des inégalités socioéconomiques, les enfants des régions pauvres et marginalisées sont particulièrement exposés au risque de blessure involontaire parce que leur logement, leur environnement de jeu et les routes qu’ils fréquentent ne sont pas sûrs.

Le Comité prie instamment l’État partie :

a)De mettre en place une procédure d’enquête détaillée applicable dans les cas où un enfant meurt ou est gravement blessé à la suite de mauvais traitements ou de négligence et, en particulier, d’enquêter de manière approfondie sur les allégations selon lesquelles un grand nombre d’enfants seraient morts dans des établissements médico-sociaux ;

b)De mener des enquêtes approfondies sur toutes les allégations de mauv