Nations Unies

CMW/C/LKA/CO/2

Convention internationalesur la protection des droitsde tous les travailleursmigrants et des membresde leur famille

Distr. générale

11 octobre 2016

Français

Original : anglais

Comité pour la protection des droits de tous les travailleursmigrants et des membres de leur famille

Observations finales concernant le deuxième rapportpériodique du Sri Lanka *

Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Sri Lanka (CMW/C/LKA/2) à ses 333e et 334e séances (voir CMW/C/SR.333 et 334), tenues les 1er et 2 septembre 2016, et adopté les observations finales suivantes à sa 341e séance, tenue le 7 septembre 2016.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique de l’État partie, qui a été établi en réponse à la liste de points à traiter avant l’établissement du rapport (CMW/C/LKA/QPR/2). Le Comité accueille également avec satisfaction les informations additionnelles fournies pendant le dialogue par la délégation dirigée par Ravinatha Aryasinha, Ambassadeur et Représentant permanent du Sri Lanka auprès de l’Office des Nations Unies à Genève et d’autres organisations internationales ayant leur siège à Genève, et composée de représentants du Ministère chargé de la promotion et de la protection de l’emploi à l’étranger et de la Mission permanente du Sri Lanka auprès de l’Office des Nations Unies à Genève et d’autres organisations internationales ayant leur siège à Genève. Il se félicite du dialogue ouvert et constructif qu’il a eu avec la délégation.

Le Comité reconnaît que si le Sri Lanka, qui est principalement un pays d’origine, a réalisé des progrès en matière de protection des droits de ses travailleurs à l’étranger, de nombreux problèmes subsistent cependant. Il note que l’État partie devient de plus en plus un pays de destination et que des efforts sont par conséquent nécessaires pour assurer la protection des travailleurs migrants dans l’État partie.

Le Comité note que de nombreux pays dans lesquels sont employés des travailleurs migrants sri lankais ne sont pas parties à la Convention, ce qui peut constituer un obstacle à l’exercice par ces travailleurs des droits que leur reconnaît la Convention.

B.Aspects positifs

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants, ou y a adhéré :

a)Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en mai 2016 ;

b)Convention relative aux droits des personnes handicapées, en février 2016 ;

c)Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des filles, en juin 2015 ;

d)Convention (no 122) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur la politique de l’emploi, 1964, en février 2016.

Le Comité se félicite de l’adoption des mesures institutionnelles et autres ci-après :

a)Le Cadre et Plan d’action pour la période 2016-2020 visant à lutter contre les violences sexuelles et sexistes, dont un chapitre est consacré aux violations et aux violences dans le secteur de l’emploi à l’étranger ;

b)La feuille de route pour la période 2011-2016 pour la lutte contre les pires formes de travail des enfants ;

c)Le Plan d’action national pour la période 2011-2016 pour la promotion et la protection des droits de l’homme, dont une section est consacrée aux droits des travailleurs migrants ;

d)La politique nationale pour la période 2006-2016 pour un travail décent et le Cadre de développement ;

e)La politique nationale en matière de santé des migrants, la Stratégie nationale d’enseignement technique et professionnel pour les populations vulnérables et la Politique nationale sur les ressources humaines et l’emploi, adoptées en 2012.

Le Comité considère que l’invitation faite par l’État partie à des titulaires de mandat au titre des procédures spéciales en décembre 2015 est un élément positif. Il se félicite du rôle de premier plan joué par l’État partie dans le cadre de mécanismes consultatifs tels que le Processus de Colombo, le Dialogue d’Abu Dhabi et le Processus de Bali concernant la traite des personnes, le trafic de migrants et la criminalité transnationale qui s’y rapporte, ainsi que le Forum mondial sur la migration et le développement.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.Mesures d’application générale (art. 73 et 84)

Législation et application

Le Comité est préoccupé par l’absence d’une législation globale sur la migration destinée à protéger les droits des travailleurs migrants ainsi que par l’insuffisance des mesures prises par l’État partie pour mettre sa législation en conformité avec la Convention et par les retards s’agissant de l’adoption du projet de loi relatif à l’Autorité chargée de l’emploi et de la migration.

Rappelant la recommandation formulée précédemment (CMW/C/LKA/CO/1, par. 14), le Comité recommande à l’État partie d’adopter une législation globale sur la migration et de prendre les mesures nécessaires pour que les lois et politiques nationales, y compris le projet de loi relatif à l’Autorité chargée de l’emploi et de la migration, soient conformes aux dispositions de la Convention.

Déclarations et réserves

Tout en se félicitant du retrait par l’État partie, le 16 août 2016, de ses réserves concernant l’article 29 de la Convention, le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie maintient ses déclarations et réserves concernant les articles 49 et 54, ce qui pourrait constituer un obstacle au plein exercice des droits des travailleurs migrants reconnus par la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour retirer ses déclarations et réserves concernant les articles 49 et 54 de la Convention.

Articles 76 et 77

Le Comité note que l’État partie n’a pas fait les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention, reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner les communications d’États parties et de particuliers concernant des violations des droits reconnus par la Convention.

Le Comité recommande à nouveau à l’État partie (voir CMW/C/LKA/CO/1, par. 16) d’envisager la possibilité de faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention.

Coordination

Le Comité se félicite de la création en 2010 du Comité consultatif national pour les migrations de main-d’œuvre, mais est préoccupé par le fait que celui-ci n’est pas suffisamment représentatif des groupes d’intérêt féminins et des principaux ministères et organismes publics œuvrant en faveur de l’autonomisation des femmes et du développement de l’enfant.

Le Comité recommande à l’État partie :

a)De renforcer davantage le rôle et les moyens du Comité consultatif national pour les migrations de main-d’œuvre en le dotant des ressources humaines, techniques et financières nécessaires, et de renforcer également son mandat en le chargeant de mettre en œuvre et de coordonner, à tous les niveaux, des politiques de migration globales, cohérentes et efficaces ainsi que d’évaluer l’impact de ces politiques sur les droits des travailleurs migrants et les membres de leur famille ;

b)De veiller à ce que le Comité consultatif compte parmi ses membres ordinaires des représentants des groupes d’intérêt féminins et des principaux ministères et organismes publics qui œuvrent en faveur de l’autonomisation des femmes et du développement de l’enfant.

Collecte de données

Le Comité se félicite des efforts de l’État partie pour fournir des données sur les travailleurs migrants à l’étranger, mais est préoccupé par le fait que les indicateurs utilisés dans les statistiques officielles de main-d’œuvre ne tiennent pas compte des travailleurs migrants. Il est également préoccupé par le caractère fragmentaire de ces statistiques, qui ne tiennent pas compte des travailleurs migrants en situation irrégulière, des travailleurs migrants enfants dans l’État partie ou des travailleurs migrants dans l’État partie.

Le Comité recommande à nouveau (voir CMW/C/LKA/CO/1, par. 22) à l’État partie de mettre en place un mécanisme qui permette de recueillir des statistiques qualitatives et quantitatives sur la migration ainsi que des informations en rapport avec tous les aspects de la Convention, notamment concernant les travailleurs migrants en situation irrégulière, et de recueillir des données détaillées sur la situation des travailleurs migrants dans l’État partie. Le Comité encourage l’État partie à compiler des informations et des statistiques ventilées par sexe, âge, nationalité, situation matrimoniale, situation de famille, motifs d’entrée et de sortie du pays et type de travail effectué, de façon à pouvoir véritablement agir sur les politiques et la mise en œuvre de la Convention, conformément à la cible 17.18 des objectifs de développement durable. Le Comité recommande également à l’État partie de renforcer les capacités des agents de l’État à recueillir et à analyser les données, et d’obtenir la coopération de ses représentations consulaires et diplomatiques à l’étranger pour compiler les données sur la migration, y compris la situation des travailleurs migrants en situation irrégulière et les victimes de la traite. Lorsqu’il n’est pas possible d’obtenir des informations précises, par exemple dans le cas des travailleurs migrants en situation irrégulière, le Comité souhaiterait obtenir des informations tirées d’études ou d’estimations.

Suivi indépendant

Le Comité accueille avec satisfaction le fait que la Commission nationale des droits de l’homme du Sri Lanka ait engagé des activités concernant les droits des travailleurs migrants et qu’elle ait nommé, en 2012, des référents pour la question des migrants. Le Comité accueille également avec satisfaction le fait que le dix-neuvième amendement à la Constitution ait renforcé l’indépendance de la Commission. Il est toutefois préoccupé par le fait que la Commission ne dispose peut-être pas de ressources suffisantes, qu’elle ne soit pas systématiquement consultée par l’État partie au sujet des questions de migrations qui ont des conséquences en matière de droits de l’homme et que l’État partie n’ait pas pleinement tenu compte de ses recommandations.

Le Comité réitère la recommandation formulée en 2015 par le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants (voir A/HRC/29/36/Add.1, par. 78 f), (en anglais seulement)) tendant à ce que l’État partie dote la Commission de ressources suffisantes, la consulte systématiquement sur toutes les questions de migrations ayant des conséquences sur les droits de l’homme et mette en œuvre les recommandations de la Commission, notamment s’agissant de la migration de main-d’œuvre de l’État partie et de la détention de migrants dans l’État partie.

Formation à l’application de la Convention et diffusion d’informations sur la Convention

Le Comité se félicite des différentes mesures prises par l’État partie afin de diffuser des informations sur la Convention et ses dispositions et de former les agents de l’État, le personnel diplomatique et les membres de la police aux questions de migration de main-d’œuvre, mais reste préoccupé par le fait que la Convention n’a pas encore été traduite dans les langues nationales.

Le Comité réitère sa recommandation précédente (voir CMW/C/LKA/CO/1, par. 24 c)) afin que l’État partie traduise la Convention dans les langues nationales et recommande à l’État partie de développer les programmes d’enseignement et de formation à la Convention, en tenant compte des questions d’égalité des sexes, et de mettre ces programmes à la disposition de tous les agents de l’État et de toutes les personnes travaillant dans les domaines en rapport avec la migration.

Participation de la société civile

Le Comité se félicite que la société civile soit représentée au Comité consultatif national sur la migration de main-d’œuvre, mais est préoccupé par le fait que les organisations de la société civile qui travaillent avec des travailleurs migrants ne soient pas représentées au conseil d’administration du Bureau sri-lankais de l’emploi à l’étranger. Le conseil est chargé de réglementer les organismes de recrutement, mais ceux-ci y sont surreprésentés, ce qui crée un conflit d’intérêt. En outre, il ne compte que deux femmes parmi ses membres.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que le processus de sélection des membres du conseil d’administration du Bureau sri-lankais de l’emploi à l’étranger soit transparent et équilibré et que les membres du conseil ne soient pas confrontés à des conflits d’intérêt. De plus, l’État partie devrait s’assurer que les travailleurs migrants et les femmes soient représentés de manière satisfaisante au conseil, et qu’un expert des problèmes d’égalité des sexes, connaissant bien les questions de migration, le droit du travail et les droits des femmes, y soit nommé en qualité de conseiller.

2.Principes généraux (art. 7 et 83)

Non-discrimination

Le Comité prend acte de la création d’un sous-comité ministériel chargé d’examiner la pratique discriminatoire consistant à demander les antécédents familiaux aux migrantes qui cherchent à trouver un emploi d’employée de maison, mais constate que la circulaire du Ministère de la promotion et de la protection de la main-d’œuvre à l’étranger sur la question n’a toujours pas été abrogée. Cette pratique viole les droits des femmes à la non-discrimination fondée sur le sexe, la situation parentale et l’âge, de même que leur droit à la liberté de circulation. De plus, elle se traduirait par une corruption accrue, une charge de travail excessive pour le personnel initialement chargé de fournir des conseils aux travailleurs migrants et à leur famille, une migration irrégulière dangereuse, l’exposition des femmes à des violences et à la traite et la perte pour leurs enfants de la garantie d’être pris en charge et protégés étant donné que leur mère s’est tournée vers la migration irrégulière.

Le Comité recommande à l’État partie :

a)D’abroger la circulaire du Ministère de la promotion et de la protection de la main-d’œuvre à l’étranger et de chercher à la remplacer par une solution globale qui protège les droits des travailleuses migrantes et de leurs enfants ;

b)De recourir aux antécédents familiaux pour identifier les familles vulnérables de travailleurs migrants et leur apporter le soutien dont elles ont besoin au lieu de s’en servir pour refuser aux femmes le droit de chercher un emploi à l’étranger ;

c)De diversifier les mesures en