Nations Unies

E/C.12/FRA/CO/4

Conseil économique et social

 

Distr. générale

13 juillet 2016

 

Original : français

 

Comité des droits économiques, sociaux et culturels

Observations finales concernant le quatrième rapport périodique de la France *

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le quatrième rapport périodique de la France sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/FRA/4) à ses 22e et 23e séances (E/C.12/2016/SR.22-23), les 6 et 7 juin 2016, et a adopté, à sa 49e séance, le 24 juin 2016, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation du quatrième rapport périodique de la France ainsi que des réponses écrites de l’État partie (E/C.12/FRA/Q/4/Add.1) à la liste de points. Le Comité se félicite également du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie.

B.Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification par l’État partie du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, le 18 mars 2015. Il accueille également avec intérêt la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et du Protocole facultatif s’y rapportant, le 18 février 2010.

4.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives, administratives et institutionnelles adoptées par l’État partie facilitant la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, notamment :

a)L’adoption de la loi no 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle, et de la loi no 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes ;

b)Les mesures au profit des personnes handicapées, notamment la signature, le 27 novembre 2013, de la convention nationale pluriannuelle multipartite d’objectifs et de moyens pour l’emploi des travailleurs handicapés, et l’adoption de la loi no 2015-988 du 5 août 2015 ratifiant l’ordonnance no 2014-1090 du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public et des transports publics ;

c)L’émission de l’instruction du Gouvernement du 6 février 2015 relative au plan d’action 2015 pour le logement des bénéficiaires du droit au logement opposable ;

d)La généralisation du mécanisme du tiers payant par la loi no 2016-41 du 26 janvier 2016 ;

e)La mise en œuvre du plan d’action « Tous mobilisés pour vaincre le décrochage scolaire » visant à diviser par deux, en 2017, le nombre de jeunes sortant sans qualification du système éducatif et à faciliter leur retour vers l’école ; et

f)La réforme du droit d’asile, entamée en 2013, menant à l’adoption de la loi no 2015-925 du 29 juillet 2015.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Applicabilité du Pacte

5.Tout en accueillant avec satisfaction le fait que la Cour de cassation de l’État partie a invoqué les dispositions du Pacte dans divers jugements, le Comité est préoccupé par le fait que cette dernière ainsi que d’autres juridictions ont rejeté l’applicabilité de certains articles du Pacte, parmi lesquels des dispositions admises par la Cour de cassation. Le Comité prend note également des critères établis par le Conseil d’État sur l’applicabilité des stipulations des traités internationaux (art. 2, par. 1).

6. Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures visant à uniformiser la pratique juridique quant à l’applicabilité du Pacte par ses juridictions nationales, s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière, ainsi que sur la décision du Conseil d’État. Il recommande notamment de sensibiliser les juges, les avocats et le public à la justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels et à la possibilité d’invoquer les dispositions du Pacte en justice. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur l’observation générale no 9 (1998) sur l’application du Pacte au niveau national.

Aide au développement

7.Le Comité regrette le niveau de l’aide au développement de l’État partie, qui est inférieur à l’objectif convenu au niveau international de 0,7 % du PNB. Il note également avec préoccupation que les « diligences obligatoires dans le champ des opérations » appliquées dans le cadre de l’aide au développement de l’État partie, telles que l’avis « développement durable » et la démarche de maîtrise des risques environnementaux et sociaux, n’assurent pas une pleine protection des droits consacrés par le Pacte (art. 2, par. 1).

8. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour porter le montant de son aide au développement à 0,7 % de son PNB, conformément à l’objectif convenu au niveau international. Il lui recommande également de développer des outils méthodologiques robustes permettant d’analyser l’impact sur les droits prévus par le Pacte des opérations financées par les institutions d’aide au développement. En outre, il recommande à l’État partie d’intégrer le Pacte parmi les instruments de référence de conformité dans ces institutions.

Accords commerciaux et d’investissement bilatéraux et multilatéraux

9.Le Comité exprime sa préoccupation quant au manque d’attention apporté à l’impact sur les droits prévus par le Pacte dans les pays partenaires des accords commerciaux ou d’investissement bilatéraux et multilatéraux en cours de négociation ou conclus par l’État partie ou l’Union européenne. Le Comité est en particulier préoccupé de ce que les mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États prévus dans plusieurs accords pourraient réduire la capacité de l’État de protéger et de réaliser certains droits consacrés par le Pacte (art. 2, par. 1).

10. Le Comité appelle l’État partie à assumer pleinement ses obligations au regard du Pacte dans le cadre de la négociation et de la mise en œuvre des accords commerciaux et d’investissement bilatéraux et multilatéraux. Il l’encourage notamment à :

a) S’assurer que des consultations auprès des parties prenantes concernées, y compris les communautés concernées, sont engagées au cours des phases d’élaboration, de négociation et de ratification de ces accords, sur la base d’une évaluation de l’impact attendu ;

b)S’assurer qu’une évaluation de l’impact est systématiquement menée au cours de la mise en œuvre des accords, afin d’adapter, le cas échéant, le contenu des engagements ; et

c) S’assurer que les mécanismes de règlement des différends ne compromettent pas la capacité de l’État partie de s’acquitter de ses obligations au titre du Pacte.

11. Le Comité engage l’État partie à prendre toutes les mesures possibles afin de s’assurer que les décisions et les politiques adoptées au sein des organisations internationales dont il est membre sont conformes aux obligations au titre du Pacte.

Responsabilité sociale des entreprises

12.Le Comité regrette le retard pris dans l’adoption de la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, en particulier dans la mesure où la loi no 2014-773 du 7 juillet 2014 d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale ne leur impose aucune obligation contraignante (art. 2, par. 1).

13.Le Comité engage l’État partie à prendre des mesures de prévention des atteintes aux droits de l’homme